aquinus

L’écologie, humaine par nature ?

In Ecologie Humaine on 17 avril 2013 at 13:48

Une tribune a été publiée sur le site de la Vie par Etienne Borocco (membre de la Conférence catholique des baptisé-e-s francophone et de l’Union des démocrates indépendants) et François Mandil (membre d’Europe Ecologie-Les Verts et collaborateur du blog « A la table des chrétiens de gauche »)

Vous trouverez ci-dessous la réponse que j’ai postée sur le site de la Vie.

Bonjour MM. Borocco et Mandil.

Je suis très étonné de votre article qui cumule erreurs, procès d’intention et mensonges. C’est une méthode que je ne trouve pas très constructive. Je pense que vous avez fait une lecture de travers de la tribune et que vous ignorez sciemment les engagements des différents signataires. De plus là où le courant (et non pas collectif) d’écologie humaine ouvre la porte à un dialogue, à une construction, vous claquez la porte en disant : circulez il n’y a rien à voir. Je vais essayer de répondre à chaque point en me basant sur ce que je connais des initiateurs, leur tribune, le site www.ecologiehumaine.eu et ce qui fait écho en moi dans le terme d’écologie humaine.

Vous accuser la tribune de ne pas être une véritable conversion. En un sens vous avez raison, il ne s’agit pas de conversion, car les porteurs de ce projet sont dans la continuité directe de l’ensemble de leurs engagements et de leurs vies personnelles.  Pour d’autres, moi par exemple, il s’agit peut être plus d’une conversion. Mais cela est de la faute directe d’EELV. En effet le manque de cohérence d’un parti comme EELV m’a toujours tenu à distance de l’écologie engagée (en revanche dans ma vie personnelle et familiale, je me considère comme véritablement écologique ou en tous cas je cherche à l’être). Et de voir des personnes de confiance, cohérentes de bout en bout sur l’ensemble des sujets de l’écologie, me « convertit » à une écologie plus engagée.

Vous comparez la relation d’écologie humaine / écologie à celle de socialisme à visage  humain / socialisme de l’URSS. C’est un lapsus intéressant de vous voir vous comparer, vous placer dans la continuité du socialisme soviétique, régime très démocratique et respectueux de l’homme. L’ensemble de votre tribune me semble effectivement digne de ce régime.

Vous construisez de toute pièce une soi-disant opposition de l’écologie humaine à l’écologie environnementale. Or il n’en est rien. Par exemple, pour moi le scoutisme fut une véritable école de l’écologie humaine : développant le sens du réel, du concret dans une vie en communauté et en s’émerveillant chaque jour de la nature donnée par le créateur. Ainsi la relation de l’homme à son environnement, la place qu’il laisse à la nature pour s’émerveiller et contempler, à la suite d’un saint François par exemple, est, à mon sens, complètement intégrée à l’écologie humaine.  C’est d’ailleurs clairement explicité dans le dernier paragraphe de la tribune de la Croix.

Vous cumulez les accusions d’homophobie. Je passe dessus, je pense que les leaders de la manif pour tous en général et Tugdual Derville en particulier se sont largement exprimés sur le sujet (je vous invite à réécouter l’émission sur France culture). En revanche un point m’interpelle tout particulièrement : la PMA. D’abord vous sous-entendez que vous y êtes favorable, ce que je ne peux pas comprendre : c’est un contresens total avec vos engagements contre la manipulation du vivant (OGM, traitement des animaux,…) Ensuite vous sous-entendez que les initiateurs de l’écologie humaine soutiennent la PMA pour les couples homme/femme. C’est méconnaitre l’action d’un Tugdual Derville au sein d’Alliance VITA : un contresens disqualifiant tout votre discours.

Vous tronquez les citations en écrivant « Les partisans de cette « écologie humaine » affirment que « les politiques environnementales en viennent à protéger la nature au détriment de l’homme » ». Or le paragraphe commence par « Dès lors que l’homme n’est qu’un matériau ». Avouez que cela change singulièrement le sens de votre citation. Je pense que dans un souci de vérité et de volonté de faire avancer l’écologie, vous suivrez de près le développement de l’écologie humaine : je n’ai aucun doute sur le fait que la question de la vie en communauté,  la réduction de l’individualisme sera au cœur de l’écologie humaine. En tous cas, c’est ce que j’inclus dans le sujet et ce que je lis dans la tribune et ce que j’ai vécu dans le scoutisme, ce que je vie aujourd’hui dans ma famille et dans mon engagement dans la vie de ma résidence (j’aime bien l’exemple de la perceuse, car la mienne a été utilisée par beaucoup de monde et j’utilise les outils de mes amis).

Je suis en total désaccord avec ce que vous dites la méthode pour remettre l’homme au centre. Vous écrivez « Remettre l’humain au centre, ça n’est pas décider ce qui est dans la nature de l’homme ou non, mais permettre à chacun de trouver sa place ». Or pour reprendre je ne sais plus qui « Pour réussir à s’ouvrir aux autres, il faut tout d’abord prendre conscience de sa propre identité ».  Pour connaitre notre place dans la nature, dans le monde, il est indispensable de savoir qui est l’homme, quelle est sa nature.  C’est une des questions fondamentale à laquelle l’écologie politique n’a pas su répondre, ou a mal répondu.

En synthèse je réponds à votre dernier paragraphe dans lequel vous écrivez « L’écologie porte un vrai projet pour l’Humanité ». Oui c’est vrai, mais pas l’écologie telle que vous semblez la défendre, pas votre tribune. Votre tribune ne construit rien. Au contraire, elle est la preuve de la dérive de l’écologisme politique d’aujourd’hui. C’est pourquoi aujourd’hui il est indispensable de rajouter ce qualificatif et de parler d’écologie humaine. Mais peut être que tout n’est pas perdu, car vous finissez par une citation du pape François à laquelle je ne peux que souscrire. Et peut être qu’en repartant de là nous arriverons à trouver un terrain d’entente, pour construire ensemble.

Cordialement,

aquinus

  1. Les mots « écologie environnementale » et « écologie humaine » ne sont pas de nous mais de Derville, rendons à César, ce qui est à César. Notre discours est justement de dire que l’écologie est déjà humaine par nature puisqu’elle étudie la relation entre Homme et environnement. Vous surinterprétez à propos de la PMA, on dit qu’on partage les réticences sur la PMA et nous ne prenons pas position dans l’article sur ce sujet. Nous disons qu’il s’agit d’un enjeu éthique, pas environnemental ou écologique. Cela n’a rien à voir avec les OGM. Un OGM comme son nom l’indique est génétiquement modifié. Le scientifique va modifier le génome de la cellule par une manipulation. Par exemple, il va altérer le code d’un virus pour qu’il implante son propre code dans le génome de la cellule. La PMA est une fécondation in vitro, ce n’est pas la même chose. L’OGM pose trois problèmes qui peuvent être scientifiquement évalués: – Les dangers pour la santé comme le montre la polémique autour de l’étude de toxicologie du dr Seralini, risque de tumeurs, cancers, maladies, etc… – La contamination des champs voisins à cause du phénomène de pollinisation – L’apparition de plantes résistantes aux insecticides qui rendent difficile la culture A ce que je sache, la PMA n’entraine ni maladies ni contamination ni de problème de santé en général. Il s’agit bien d’un problème éthique car ce qui est remis en cause, c’est la moralité du geste. C’est ça qui fait débat. Quand un écologiste dénonce les OGM, c’est justement à cause de répercussions sur l’environnement qui peuvent être scientifiquement mesurées. Il ne se place pas sur un champ moral, vous voyez bien que le débat est différent. Cette comparaison OGM/PMA en plus d’être fausse peut vous desservir car l’alternative à la recherche sur les cellules souches embryonnaires est la découverte du prix nobel de 2012 les cellules souches adultes reprogrammées sont justement des OGM! Il s’agit bien de cellules dont a touché à l’ADN.

    • Quitte à rendre à César ce qui est à César… l’expression écologie humaine n’est pas de M. Derville. Elle existait avant. MM. Derville, Hériard Dubreuil et Gomez cherchent à lui donner corps.

  2. Suite:
    La citation de Derville n’a pas été tronquée et cette critique des politiques environnementales sans aucun exemple concret revient régulièrement sur le site.
    Au passage même si on complète avec ton bout de phrase, cite-moi juste une politique écologique qui prend l’homme pour un matériau.
    Pour avoir bossé à l’ADEME, je peux te dire qu’à chaque fois l’Homme était au centre. Par exemple, le fonds chaleur doté d’1,2 milliards d’euros sur la période 2009-2013 a pour but de financer des chaufferies biomasses et des réseaux de chaleur. Le gain est double car de l’emploi est créé localement dans les chaufferies et l’exploitation forestière et l’énergie utilisée est propre et renouvelable.

    Au passage, je note que vous n’avez aucun mot de compassion pour les 800 millions de personnes qui meurent chaque année de la pollution de l’eau et pour les victimes du réchauffement climatique.
    Le coeur du sujet, c’était ça. Vous ne parlez pas d’environnement mais de nature humaine, cela n’a juste à rien à voir avec l’écologie.
    Votre combat n’est pas mauvais en soi, c’est juste que ce n’est pas de l’écologie.

    • Je récuse totalement l’accusation du manque de compassion vis à vis des victimes des problèmes liées à l’eau. Elle est inacceptable.

      • Dans ce cas-là, parlez-en.
        Pourquoi on vous entend jamais en parler?
        C’est marrant cette tendance à préférer les micro-sujets éthiques plutôt qu’aux sujets globaux et complexes.
        La solution de la facilité?

        En tant que Chrétien, pourquoi ne vous indignez-vous pas non plus quand vous voyez les travaux du CCFD sur les paradis fiscaux, par exemple?

  3. Cher ataraxia,

    je laisse vos commentaires comme démonstration de mon billet :

    1. vous ne faites que des procès d’intentions.
    2. vous montrez le mépris que vous avez pour les sujets de bioéthique et le fait que vous refusez d’intégrer tout l’homme et tout homme dans l’écologie

    Je trouve cela profondément blessant et regrettable alors que nous pourrions faire tant de choses en unissant nos forces, car tous ces sujets sont inextricablement imbriqués.

    Cordialement,
    aquinus

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